Mort de The Daily: une victoire pour la liberté de l’information

  • Dernière modification de la publication :20/12/2014
  • Commentaires de la publication :27 commentaires
The Daily: au-delà du publireportage!
The Daily: au-delà du publireportage!

Je n’ai pas versé une larme en apprenant lundi la disparition le 15 décembre du quotidien The Daily créé spécifiquement pour l’iPad et d’abord exclusivement pour cette ardoise. Bien au contraire. Cette disparition montre la limite de certaines formules multimédias beaucoup trop fermées reposant uniquement sur des applications.

Ce cuisant échec révèle aussi que les consommateurs sont de moins en moins enclins à payer l’information sur les nouveaux supports numériques. Il met également en cause tous les bricolages numériques actuellement en testouillage (les mêmes depuis plus de dix ans: pathétique) en Suisse romande et ailleurs.

Une insulte à l’universalité

Quelles limites pour commencer? De mon point de vue, l’idée de lancer un quotidien spécifique à une machine commercialisée par une seule marque est une insulte à une certaine liberté d’information et à une certaine universalité recherchée depuis toujours par les plumes qui ont compté. D’une certaine manière, le lancement du Daily a constitué l’apogée du publireportage.

Comment peut-on imaginer être aussi dépendant d’une seule marque? On me fera remarquer que The Daily était aussi disponible sur Android. Oui, mais sur une ou deux tablettes dont le Kindle. Là aussi, on retrouve cette volonté de ne proposer des contenus que sur certains supports seulement. Une aberration et probablement une insulte de plus aux encyclopédistes…

Le web au centre

Travaillant depuis une douzaine d’années sur la toile et ayant contribué au développement ou au lancement de plusieurs sites, sites mobiles et applications, j’ai toujours été convaincu qu’il était nécessaire de fournir ses contenus au plus grand nombre sans barrière technologique.

Pour atteindre cet objectif, le web reste aujourd’hui la plate-forme idéale et la plus économique. Il doit être au cœur de tout dispositif d’informations sérieux. Comment imaginer une publication dont le centre de gravité ne serait pas son site internet? The Daily l’a fait… Il est mort et c’est bien fait.

De chers développeurs

Quant aux applications proposées par des développeurs toujours enclins à lancer des solutions très fermées, onéreuses et peu réutilisables, elles ne doivent être perçues que comme des sortes de bonus. Elles doivent comporter le nombre de lignes de code le plus limité possible et pourquoi ne pas reposer sur des solutions comme PhoneGap.

Cet échec montre aussi que certains grands pontes du multimédia, souvent des imposteurs autoproclamés, semblent aussi incompétents de l’autre côté de l’Atlantique, que de ce côté comme j’ai pu le constater ces dernières années. En effet, tant le service public que les éditeurs n’ont actuellement aucune vision rentable et acceptable de notre société de l’information.

Malheureusement, pour ces personnes, le multimédia est souvent d’abord une sorte de tremplin dans leur carrière. Ces décideurs, qui peinent parfois à allumer leur ordinateur tout seuls, continuent de prendre de mauvaises décisions, de diviser pour régner et d’entraver le développement d’une offre raisonnée…

Xavier Studer

Cet article a 27 commentaires

  1. Patrice

    100% d’accord. Vous avez dit l’essentiel M.Studer respect. L’avenir est dans le partage.

  2. Lancelot

    J’ai entendu un commentaire pertinent qui explique pourquoi The Daily a disparu.

    L’utilisation des appareils communicants actuels s’utilise en général de cette manière: Le matin smartphone dans les tp, arrivé au job on passe sur un PC puis on réutilise son smartphone pour le retour à la maison et c’est seulement le soir qu’on utilise sa tablette. C’est là que le bas blesse, The Daily est un journal numérique du MATIN, voilà tout le problème…

    Je suis en outre d’accord sur le fait qu’un journal numérique devrait au moins être supporté par tous les supports quelque soit la marque ou la taille de ce dernier.

    Bien essayé…

  3. laurent

    Plutôt que de brasser de l’air M Studer, quelle est votre vision de la solution idéale dans le monde des medias ? Parce que c’est bien gentillet cette vision de l’info libre et ouverte à tous mais il y a bien un moment donné où il faut payer des gens si on veut une information de qualité. Les medias sont perdus, c’est un fait, mais des sociétés comme Google que vous chérissez si naivement leur font un tord considérable.

    Personnellement je suis prêt à payer pour de l’information de qualité, mais qu’en est-il de la nouvelle génération élevée au tout gratuit ? Du même contenu un peu partout dont on ne sait rien de qui l’a financé, voilà ce que propose les sites à grosse audience.

  4. Saïmon

    La question centrale de “qui est prêt à payer pour une info de qualité”: La réponse est presque personne, la majorité se contentant de 20 minutes et autres. Il faut voir les choses en face: dans un monde ou tout augmente continuellement (loyers, assurances maladie, essence…) les gens doivent faire des arbitrages. C’est le règne du lowcost (dans l’information aussi), n’en déplaise à la petite élite journaliste Romande (celle qui vient de licencier 10% de l’effectif du Temps).

  5. noisequik

    Le Matin Dimanche vient de sortir son app sur l’iPad qui est très sympa. Certains devraient en prendre de la graine…
    (Merci de ne pas polémiquer sur la qualité intrinsèque de ce journal)

  6. Mark

    “Comment peut-on imaginer être aussi dépendant d’une seule marque? […] j’ai toujours été convaincu qu’il était nécessaire de fournir ses contenus au plus grand nombre sans barrière technologique.”
    Tiens, ce n’était pas vous qui vous félicitiez de l’intégration/support de Flash, propriété d’Adobe, une compagnie qui dicte la compatibilité entre son produit Flash et les plateformes utilisateurs ?

    J’ai comme l’impression que quelqu’un se mord la queue…

    1. jean-Luc

      Si vous être contre le flash, contre le html, contre Java, contre tous ce qui façonne le web, il ne vous reste plus qu’a acheté la version papier….flash ne s’oppose pas au reste, c’est juste un composant du web, pour quelle raison voulez-vous l’éliminer?

      1. Mark

        Rien à voir.
        Je piquais Xavier Studer sur sa remarque “il était nécessaire de fournir ses contenus au plus grand nombre sans barrière technologique”, alors que quelques billets en arrière, il se félicitait du plugin flash embarqué dans Android… Deux discours opposés….

        1. Xavier Studer

          Certainement pas. Adobe a toujours souhaité développer Flash sur tous les systèmes. Ils ont aussi du composer avec des tyrans fanatisés en bout de règne…

      2. alex67

        http://www.zdnet.com/blog/open-source/adobe-abandons-linux/10418

        selon Xavier ” Adobe a toujours souhaité développer Flash sur tous les systèmes. Ils ont aussi du composer avec des tyrans fanatisés en bout de règne…”

        Linux en bout de règne. Je rappelle juste linux est libre, gratuit, ouvert …

        pour ceux qui sont intéressés : http://en.wikipedia.org/wiki/Flash_for_Linux#Alternatives
        voir le chapitre “Vendor depence”. Et non, les citations ne proviennent pas de Steve Jobs mais de Tristan Nitot, Richard Stallman.

  7. Grand Lapin

    Je trouve lamentable de se réjouir ainsi d’un échec commercial qui implique le licenciement de dizaines de journalistes. Je suspecte d’ailleurs que la raison véritable de votre contentement est que ce journal était principalement vendu sur iOS que vous détestez tant.

    De plus, dire que le web est la solution à tout est un peu simple. La plupart des tablettes vendues n’ont pas la 3G et ne peuvent donc pas consulter des sites web en déplacement. Seule une application peut offrir un téléchargement préalable et un bon confort de navigation dans le journal, particulièrement s’il propose un contenu multimédia riche.

    Et si le public est encore prêt à payer quelques francs pour une application, il l’est beaucoup moins pour accéder à des sites web où tout est sensé être gratuit. Les modèles basés uniquement sur la publicité aboutissent à des journaux aux pubs envahissantes comme le 20 Minutes, qui sont le degré zéro du journalisme d’investigation.

    1. Xavier Studer

      Je trouve lamentable de se prétendre journaliste et de n’écrire que pour les clients d’une seule marque en acceptant son éventuelle censure…

    2. jean-Luc

      Je suis abonné au journal l’Express, celui-ci fournit la version papier, la version Web normal, la version web mobile (donc marche sans application), une application Android et Iphone sont également disponibles, toute ces versions sont disponible en internet câblé,Wi-Fi et 3G car à moins de réduire volontairement la connexion data d’une technologie, une application ne fait pas de différence entre la 3G,le Wi-Fi ou un câble.
      La rémunération se fait par l’achat d’un abonnement au journal, vu leur difficultés, c’est pas la peine d’engraisser un intermédiaire au passage, il suffit d’introduire une identité et un mot de passe qui est mémorisé dans les appareils des abonnées pour accéder à l’intégralité du contenu des articles.

  8. andro

    Ce blog et son auteur sont adeptes des plus belles contorsions c’est un fait. Mais après tout, M. Studer est sur son blog et raconte ce qu’il veut. Même s’il aime faire le grand écart billets après billets, chacun est libre d’aller voir ailleurs.
    Mais quand je lis que M. Studer se réjouit de la mort d’une société, d’une entreprise – et peu en importe les raisons, le résultat est toujours le même: des gens perdent leur job – là son attitude me débecte carrément. Ça n’est même plus une réflexion ultra-libérale. C’est un raisonnement dénuée de sens et irréfléchi.

    1. Xavier Studer

      Je trouve lamentable de se prétendre journaliste et de n’écrire que pour les clients d’une seule marque en acceptant son éventuelle censure… Ce doit être irréfléchi… Évidemment, je plains les salariés qui ont fait confiance à des cyber-incompétents. Et croyez-moi, là je suis bien placé pour savoir de quoi je parle puisque j’ai vécu de très près le démantèlement d’Edicom.

      1. andro

        Puisque vous me répondez directement: je ne suis pas journaliste. En revanche, vous, vous prétendez l’être…

        1. Xavier Studer

          J’ai reçu une formation complète de journaliste sanctionnée par un Certificat du CRFJ, Mention Très bien. Je m’exprime ici, pour mon plus grand plaisir, en tant que blogueur, statut que j’affectionne particulièrement.

      2. fred

        remarque hypocrite puisque de toute manière l’info est déja manipulée par la rédaction en chef d’un journal, voire son éditeur. Le diffuseur n’en est que secondaire. Et comme exemple, on peut sans doute imaginer que votre article aurait été tout autre si l’expérience avait été faite sous Android.

  9. le G.O.

    Je suis clairement d’accord avec laurent, Saïmon et Grand Lapin, quel modèle proposer alors qu’encore beaucoup sont prêts à payer pour une info de qualité, et que dire de l’échec du personnel “éjecté” avec ce journal…

    1. jean-Luc

      Voici un exemple de ce que l’on peut faire :
      http://www.arcinfo.ch/fr/
      Ce site est accessible à tous les systèmes, y compris les mobiles, vous avez un résumé des infos, mais vous devez êtes abonnés pour voir l’intégralité des articles ou pour y poster vos commentaires, personne ne prétend que l’information doit être gratuite, mais elle doit être accessible à tous le monde indépendamment du matériel utilisé.

  10. grypas

    On est mitraillés par l info, nul besoin d avoir des journaux entiers en application. L utilisation des flux avec FlipBoard, Google News région-pays-monde, Puls News, Google Reader, etc… Permettent d être bien suffisamment informé avec nos besoins spécifiques. L actualité on la paye avec nos forfaits mobiles et accès internet du ménage, c est aux opérateurs de distribuer l argent équitablement. On paye aussi des droits d auteurs plusieurs fois avec nos factures et nos appareils achetés.

    1. fred

      Exactement le genre d’arguments qui font bondir, avec de telles pensées on va droit vrai l’information formatée et sans recul. Enfin on y est déjà. Tous vos exemples sont révélateurs, vous vous retrouvez avec toujours les mêmes sources. Le problème est que l’info de qualité se paie.

  11. Nycko

    Oui, vous le dites, on y est déjà, j utilise ce qui m est offert par la technologie. Les applications de News sont nombreuses, l argent coule à flot dans ce que nous payons pour accéder au WEB. Une bonne redistribution est la clef….J ai pas envie non plus d avoir qu 1 seule source qui est GOOGLE

  12. Patrick

    L’information doit être libre (pas forcement gratuite) pour être accessible au plus grand nombre.

    Pour le financement, regardez ce qui ce passe en politique:
    Partant d’un postulat de Luc Recordon (http://www.parlament.ch/f/suche/pages/geschaefte.aspx?gesch_id=20123326) qui propose une nouvelle forme de rémunération pour les auteurs, écrivains, musiciens, journalistes,… sur internet,
    Le conseil fédéral a mis sur pied un groupe de travail (http://www.ejpd.admin.ch/content/ejpd/fr/home/dokumentation/mi/2012/2012-08-09.html) qui va plancher sur ces questions. Une possibilité serai que les internautes payent une “contribution créative” (p.ex. prélevée sur l’abonnement internet) et qui serai reversée aux auteurs en échange du libre accès (téléchargement) aux oeuvres. Si ils font bien leur boulot et qu’ils considèrent les nouvelles formes de créations (comme les blogs,…), il se pourrai bien que Xavier puisse abandonner la pub à la fin 2013 🙂

    Si vous voulez participer au débat, contactez la FRC qui représente les consommateurs romands dans ce groupe de travail (http://www.ejpd.admin.ch/content/ejpd/fr/home/dokumentation/mi/2012/2012-10-08.html).

    1. Mark

      Une taxe supplémentaire déguisée pour les droits d’auteurs ! Non merci !!
      La Suisa taxe bien suffisamment et s’est assez irritant comme ça : tout y passe, scanners, photocopieuses, lecteurs cd/DVD, support de stockage divers (téléphones portables, clés USB, disques durs,…) même les feuilles blanches !!! À quoi bon passer par les canaux de diffusions légaux si ce n’est pour payer deux fois : une fois pour l’iPod, une seconde pour le CD. Alors non ça suffit !
      Les personnes qui veulent de l’informations de qualité peuvent se payer un abonnement au journal Le Temps. Mais laissons le porte-feuilles des lecteurs de 20minutes tranquille !!!!

      1. Patrick

        Contacte la FRC (ou un autre dans la liste) et fait leur valoir ton point de vue. C’est un débat démocratique (du moins j’espère).

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