
Le boulevard s’est récemment emparé de certains tests de débit sur internet, comme Networktest, une solution des opérateurs imposée par la loi se voulant indépendante. Constatant des anomalies dans les valeurs communiquées, j’ai voulu y voir plus clair. Petit test des outils de test de débit d’internet…
Pour commencer, rappelons que Networktest.ch permet de mesurer les connexions internet depuis septembre 2021. Une modification de la loi sur les télécoms oblige désormais Salt, Sunrise UPC et Swisscom d’informer le public sur la qualité de leurs services. Ce site a donc été développé par ces opérateurs sur mandat de l’Office fédéral de la communication (OFCOM).
Les anomalies de Networktest
Les données sont accessibles de manière détaillée sur internet. Elles permettent une analyse assez poussée. Sur le fixe, on constate par exemple que, pour un opérateur comme Salt, qui ne propose que de l’internet symétrique à 10 Gigabits/sec sur la fibre optique, la vitesse de téléversement est anormalement basse.
Ces mesures étant proposées librement en téléchargement, il est possible de les analyser en fonction du type de connexion utilisé et par type de machine aussi bien pour le téléchargement que le téléversement. Et c’est là qu’on peut déceler des anomalies, comme des mesures en VDSL pour Salt qui ne propose pas cette technologie!
Sur un Mac Studio capable de télécharger des données à environ 7 Gigabits/sec, la vitesse de téléversement chute à 1,5 Gigabit/sec environ, ce qui ne correspond pas à toutes les mesures effectuées avec d’autres outils, tels que Ookla, nPerf ou CNLAB. Comment s’y retrouver?
Des questions de configuration
Interrogé sur les valeurs de Networktest, Salt explique que les résultats de ces outils dépendent de différents facteurs, comme la configuration du serveur, les logiciels installés dessus (antivirus par exemple) et enfin la qualité de l’interconnexion internet entre les serveurs de l’outil de test et l’opérateur (peering).
Pour en avoir le cœur net et vérifier ou infirmer que les vitesses de téléversement affichées par Networktest sont jusqu’à dix fois inférieures constatées avec d’autres outils, j’ai utilisé la veille le service d’échange canadien de fichier MASV (massive.io). A lire ici.
Verdict? Il est bien possible de télécharger ou de téléverser des fichiers à des vitesses de plusieurs Gigabits/sec, contrairement à ce que pourrait laisser penser une lecture des résultats de Networktest, qui doivent donc être pris avec la plus extrême prudence, comme je l’ai expliqué récemment dans cette note.
Des exemples concrets de mesures
Pour montrer la difficulté de mesurer précisément les capacités des meilleures offres internet, je propose ci-dessous les résultats synthétiques de plusieurs tests de réseaux, tels que Ookla, nPerf, CNLAB, Networktest et la capture d’écran de la mesure de débit effectués directement depuis le routeur de Salt sur ses propres serveurs. Toutes les mesures ont été effectuées depuis les applications pour macOS.
C’est d’ailleurs un point essentiel. Sur la plupart de ces tests, on peut choisir un autre serveur que celui de son opérateur. Dans ce cas, les résultats dépendront notamment de l’interconnexion à son fournisseur d’accès à internet. Ces différents tests ont été effectués au travers d’une connexion LAN en utilisant un adaptateur Ethernet Sonnet Solo 10G.
Des débits variant constamment
En résumé, concernant le réseau de Salt Fiber, on constate qu’Ookla affiche des vitesses de l’ordre de 7,6/7,5 Gigabits/sec sur un serveur Wingo, nPerf de 8,1/7,6 Gigabits/sec sur serveur Salt, CNLAB de 6,3/6,4 Gigabits/sec sur serveur Swisscom, lorsque Networktest se traîne à 2,6/0,3 Gigabits/sec. Enfin, directement sur le routeur de Salt, on mesure 7,9/7,6 Gigabits/sec.
Précisons que ces résultats varient constamment… Par exemple, j’ai effectué ces différents tests dimanche en matinée et début d’après-midi. En fin de journée, la bande passante disponible sur le réseau de Salt a baissé à environ 2 Gigabits/sec, contre 7 à 8 plus tôt dans la journée, selon Ookla. Visiblement, la demande a fortement augmenté à ce moment.
Networktest pas fiable, interprétations prudentes
La conclusion de ces expérimentations? Il est toujours appréciable de disposer de données en libre téléchargement, comme celles de Netwoktest. Cela permet de déceler les limites et les problèmes spécifiques à la collecte de données, pour autant qu’on ait les compétences nécessaires pour les interpréter.
Finalement, on peut se demander si ces tests ne sont pas révélateurs de tous les problèmes qui existent encore aujourd’hui pour accéder à l’internet de demain: d’abord chez le particulier, puis sur le réseau lui-même. Le peering est souvent insuffisant entre les opérateurs, l’infrastructure n’est souvent pas compatible ou simplement pas à jour. Bref, ne prenez pas à la lettre les mesures de Networktest, qui a montré ses manques.
Xavier Studer